L’obésité : un problème de santé publique majeur qui ne cesse de croitre
L’obésité est définie par un indice de masse corporelle (IMC[1]) égal ou supérieur à 30 et a un impact conséquent sur la santé des personnes concernées. Causée par une alimentation riche en calories, un manque d’activité physique et des facteurs génétiques prédisposants, l’obésité constitue un facteur de risque principal pour de nombreuses pathologies chroniques. En effet, l’obésité entraîne des facteurs de risque intermédiaires tels que l’hypertension, la dyslipidémie[2], la résistance à l’insuline et l’inflammation systémique, augmentant la probabilité de pathologies graves telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète de type 2 ainsi que certains cancers.
En France en 2020 47,3% des adultes étaient en surpoids (IMC supérieur à 25) incluant 17% d’adultes obèses (contre respectivement 38,3% et 10,1% en 2000). L’augmentation de la prévalence de l’obésité et les risques associés en font une des problématiques de santé publique majeure et l’obésité est ainsi responsable chaque année de 6,6 millions de pathologies, traitements et épisodes de soins et de plus de 60 000 décès.
Un coût financier conséquent pour la collectivité et pour les complémentaires santé
En France, l’obésité entraine un coût annuel total estimé à 10,6 milliards d’euros par an[3], soit 1 250 euros en moyenne par individu concerné. Ce montant englobe diverses dépenses réparties entre plusieurs acteurs clés du système de santé et de l’économie. En effet, le coût de l’obésité est pris en charge à 80% par l’assurance maladie, 12% par les complémentaires santé et 8% par les entreprises.
L’obésité représente ainsi un coût d’1,3 milliards d’euros chaque année pour les organismes complémentaires qui se répartissent comme suit : 1,1 milliards d’euros de soins de ville (consultations médicales, médicaments et soins paramédicaux) et 0,2 milliard d’euros de soins hospitaliers (interventions chirurgicales et traitement de complications graves par exemple).
Ce coût représente une part conséquente des prestations versées par les organismes complémentaires, atteignant 32,8 milliards d’euros[4] en 2020. Le ratio coût de l’obésité / total des prestations versées s’élevait ainsi à 4,2%.
Un enjeu sanitaire et financier clé pour les complémentaires santé
Les données épidémiologiques développées supra ainsi que le coût annuel de l’obésité pour les organismes complémentaires démontrent la nécessité de renforcer les démarches de prévention afin de réussir à inverser la tendance et diminuer la prévalence de l’obésité.
Aujourd’hui, les organismes complémentaires de santé jouent un rôle important dans le financement de la prévention et prennent en charge 16%[5] des dépenses totales de cette dernière (tous dispositifs de prévention confondus). Cependant, si aujourd’hui de nombreux dispositifs de prévention tant primaire, que secondaire et tertiaire existent, les stratégies adoptées ne permettent pas d’atteindre l’objectif de diminution de la prévalence de l’obésité ni même le ralentissement de l’augmentation de cette dernière.
Réinventer les approches des organismes de santé pour inverser la tendance
Face à l’urgence de la situation et à l’échec des approches de prévention menées précédemment, il convient désormais de faire évoluer ces dernières en prenant en compte les contraintes qui s’imposent aux organismes complémentaires : accès limité aux données de santé, cadre financier et institutionnel désincitatif, comptabilisation des frais de gestion.
- Renforcer la prévention secondaire et tertiaire
Pour répondre à ce défi, il est nécessaire pour les organismes complémentaires de se concentrer sur la prévention secondaire et tertiaire (l’Assurance Maladie étant l’organisme le mieux placé pour réaliser de la prévention primaire massive) en renforçant leurs offres existantes en particulier dans le cadre des contrats collectifs dans une approche partenariale avec les employeurs.
Plusieurs pistes d’action peuvent être envisagées dans le champ d’action historique des complémentaires : augmentation des forfaits diététiciens, prise en charge d’examens médicaux préventifs tels que les épreuves d’effort permettant de proposer par la suite des programmes de remise en exercice adaptés et suivre l’évolution des patients, prise en charge financière d’abonnements à des applications de santé certifiées avec un accès aux données en contrepartie pour pouvoir individualiser le suivi et l’accompagnement, accompagnement en entreprise via des actions collectives ciblées, etc.
- Agir sur la chaine de valeur de la nutrition
Il existe un autre levier sur lesquels les organismes complémentaires pourraient envisager un positionnement novateur : la diversification sur la chaine de valeur de la nutrition. En aval de la prise en charge financière évidemment : par le biais de conseil, coaching ou en prenant part au système de soins. C’est un positionnement qui existe déjà mais pourrait faire l’objet d’un investissement plus fort, en particulier dans l’accompagnement individuel.
Plus novateur encore, l’engagement des organismes complémentaires en amont de la chaine de valeur sur le champ de l’industrie agroalimentaire ou des distributeurs. Cela aurait plusieurs vertus : travailler à la racine des problématiques en tentant de transformer les produits consommés, participer à améliorer la santé des individus et donc diminuer les coûts de prise en charge de l’obésité sur le long cours et enfin utiliser ce champ comme un espace de diversification économique.
Cette diversification n’est pas naturelle en France pour le secteur de l’assurance santé. Pourtant, elle est une voie qui s’avérerait utile à la consolidation économique des assurances et à la promotion de chaines de valeur cohérentes et impactantes pour les Français.
[1] Le calcul de l’indice de masse corporelle ou IMC (poids divisé par la taille au carré) indique si la personne est en surpoids.
[2] Anomalie quantitative et qualitative de paramètres lipidiques comme le cholestérol total
[3] ASTERES, Mars 2022
[4] DRESS, Décembre 2023
[5] ASTERES, Avril 2022
Antoine Evennou, Directeur & Camille Dugelay Supervising Senior
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Matthieu Sainton
Associé Eurogroup Consulting