L’intelligence artificielle générative, incarnée par des outils comme ChatGPT, a rapidement capté l’attention du grand public et des entreprises. Depuis son lancement en novembre 2022, ChatGPT a connu une adoption fulgurante, atteignant 400 millions d’utilisateurs hebdomadaires à ce jour. Cette technologie promet de transformer divers secteurs en améliorant l’efficacité et la créativité. Cependant, malgré cet engouement, des questions subsistent quant à sa capacité à créer de la valeur à grande échelle pour les organisations.
Eurogroup Consulting et La Javaness ont mené entre novembre 2024 et janvier 2025 une étude sur l’utilisation de l’IA générative auprès de 46 organisations, parmi lesquelles des grands groupes internationaux, des ETIs et des organismes publics et les secteurs couverts, divers, incluaient l’industrie, l’énergie, les services, les transports, le secteur public ainsi que la banque et les services financiers.
Une étude qui révèle que l’adoption de l’IA générative est encore largement expérimentale. Bien que toutes les organisations interrogées montrent un vif intérêt pour cette technologie, plus de 95 % des projets sont encore à un stade pilote ou en cours de passage à l’échelle. Les investissements, parfois de plusieurs millions d’euros, sont freinés par des obstacles technologiques, organisationnels, culturels et humains. La majorité des initiatives ont été lancées il y a moins d’un an, et les organisations peinent à passer de l’expérimentation à une adoption à grande échelle.
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Un engouement certain mais une adoption encore expérimentale
L’IA générative suscite un intérêt massif dans les organisations, mais son intégration reste encore en phase exploratoire. Toutes les entreprises et organisations publiques ayant participé à notre benchmark ont exprimé un vif intérêt pour cette technologie, et pourtant, la majorité des initiatives restent récentes – souvent lancées il y a moins d’un an.
Sur notre échantillon, plus de 95% des projets sont encore à un stade de pilote ou sont en cours de passage à l’échelle. Malgré des investissements significatifs – parfois de plusieurs millions d’euros – les défis freinant un déploiement à grande échelle dépassent largement la seule question budgétaire. Les organisations sont confrontées à des obstacles technologiques, organisationnels, culturels et humains, rendant encore incertaine une adoption complète et pérenne.
Des stratégies différenciées d’encadrement des outils d’IA générative
L’encadrement de l’accès et l’accompagnement à l’utilisation des outils de l’IA générative varie d’une organisation à l’autre. L’échantillon étudié fait ressortir trois stratégies d’encadrement des outils d’IA générative.
D’abord, il faut encadrer l’accès aux outils grand public sous conditions : de nombreuses organisations autorisent l’utilisation d’outils grand public comme ChatGPT ou Copilot, mais dans un cadre strict. Des chartes d’utilisation précisent les bonnes pratiques et les risques liés à la confidentialité et à la sécurité des données.
Autre stratégie principale : accompagner les utilisateurs pour les former aux usages des outils d’IA générative : certaines organisations combinent l’accès aux outils avec des programmes de formation pour aider les utilisateurs à tirer le meilleur parti de ces technologies tout en minimisant les risques. Ces formations couvrent des sujets tels que la compréhension de l’IA, les bonnes pratiques de prompt engineering et l’utilisation responsable des ressources.
Last but not least : développer des outils internes sécurisés : Pour maîtriser leurs données, certaines organisations développent des solutions d’IA générative en environnement restreint et sécurisé. Ces plateformes servent des usages bureautiques et métiers, avec des formations spécifiques pour les utilisateurs.
Malgré des gains de productivité au niveau des individus, la création de valeur à l’échelle des organisations reste incertaine
Les outils d’IA générative permettent des gains de productivité significatifs à l’échelle individuelle. Les utilisateurs réguliers rapportent des économies de temps de quelques heures par semaine. Cependant, ces gains ne se traduisent pas toujours par une création de valeur à l’échelle organisationnelle. Les dirigeants perçoivent l’IA générative comme un levier stratégique, mais la structuration d’une intégration efficace reste un défi. Les secteurs comme l’IT, le marketing, la gestion des risques et de la fraude, ainsi que les métiers juridiques montrent une adoption plus avancée, intégrant l’IA générative dans leurs pratiques quotidiennes. Des cas d’usage spécifiques ont déjà montré comment l’IA permet d’automatiser certaines tâches, comme l’auto-complétions de code (le plus généralisé), ou encore la gestion des incidents, la documentation du code ou l’analyse des logs, réduisant le temps de réponse et augmentant l’efficacité des équipes.
Les quatre défis majeurs pour le déploiement de l’IA générative
Les organisations de l’échantillon partagent largement quatre défis fondamentaux à prendre en compte pour le déploiement à grande échelle des solutions d’IA générative. L’objectif est de s’assurer à la fois d’une adoption efficace et durable mais aussi d’une stratégie équilibrée combinant innovation, performance et responsabilité, permettant de tirer pleinement parti des opportunités de cette technologie, tout en maîtrisant ses coûts et ses impacts.
- Rentabilité et prise de risque, trouver le bon équilibrre : Le coût d’implémentation des solutions d’IA générative est élevé, et une rentabilité immédiate est rarement garantie. Les organisations doivent équilibrer coût, performance et retour sur investissement, en adoptant une approche pragmatique pour maximiser les gains à long terme.
- Data : passer le cap de la gouvernance des données : La qualité, l’accès et la sécurité des données sont cruciaux. Les modèles d’IA générative nécessitent des volumes massifs de données, souvent dispersées et de qualité inégale. Une gouvernance efficace des données est essentielle pour garantir des résultats pertinents et conformes aux réglementations.
- Dépendance technologique et souveraineté numérique : La dépendance aux grandes entreprises technologiques, principalement américaines, pose des risques de sécurité et de contrôle des données. Moins d’un quart des organisations favorisent l’utilisation d’un écosystème local souverain, malgré les initiatives pour promouvoir une IA souveraine.
- Impact environnemental, un défi sous-estimé : L’IA générative est énergivore, avec une empreinte carbone significative. La maîtrise de cet impact passe par l’optimisation des modèles, l’utilisation d’infrastructures écologiques et une utilisation raisonnée de l’IA.
L’IA générative impressionne par la rapidité de sa diffusion, son adoption à l’échelle individuelle et les gains de productivité diffus qu’elle permet. Si son usage reste encore expérimental à l’échelle, son déploiement dans les organisations devrait connaître une croissance accélérée, plus rapide encore que celle de l’IA traditionnelle. Toutefois, pour maximiser son impact et obtenir des gains de performance à l’échelle, il est essentiel que les organisations ciblent des usages métiers spécifiques, où la valeur ajoutée est la plus forte, par exemple la DSI, le service client et usager, le marketing ou encore l’analyse financière. Mais pour que ces gains se traduisent par un retour sur investissement concret, il faudra mener les transformations métiers, mesurer précisément la performance des solutions et ajuster leur utilisation en fonction des résultats observés. Par ailleurs, les enjeux de souveraineté numérique et de dépendance technologique ne peuvent être ignorés. La question n’est plus de savoir si elle va s’imposer, mais comment les organisations peuvent l’adopter de manière durable et stratégique.
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